Wayne H DeHaven

A LA MEMOIRE

 

C'est avec beaucoup de tristesse que je dois vous faire part de la disparition de mon ami Wayne Dehaven. Il est décédé paisiblement, le 23 décembre 2020. N'oublions jamais ce que ce monsieur a fait pour nous. Repose en paix Wayne.

Un tout grand merci à Gregory de Cock pour avoir partagé avec moi son travail.

 

<= Wayne DeHaven dans les Années 40

Et aujourd'hui =>

 

De l’enfant de St Paul au parachutiste de Camp Forrest
Wayne Herbert DeHaven vit le jour le 15 juin 1923 dans l’est de la ville de St Paul, comté de Ramsey, Minnesota, Etats-Unis. Son père, Walter DeHaven, d’origine franco-canadienne avait épousé en 1917 Borghild Mickelson, fille d’immigré norvégiens ; ils eurent deux enfants Géraldine et Wayne. Le garçon dut abandonner ses études avant la dernière année du lycée pour assister sa mère. Il entra ainsi dans la vie active en travaillant dans une station-service. Tout juste âgé de vingt ans, alors qu’il œuvrait dans un chantier naval à Bremerton, état de Washington, le gouvernement Américain l’appela à servir son pays. Le jeune homme rejoignit St Paul afin de se présenter à Fort Sneilling Minnesota, garnison américaine la plus proche. Au moment de son intégration dans l’armée nationale des Etats-Unis le 19 juillet 1943, Wayne était citoyen Américain de race blanche, célibataire, sans dépendant et travaillant comme ouvrier semi-spécialisé dans la fabrication de patrons et de maquettes industrielles. La nouvelle recrue De Haven reçu le numéro de matricule 37572909. « Très rapidement après mon entrée à l’armée, je me suis porté volontaire pour les troupes parachutistes. La raison était double : il y avait une prime de 50 dollars et j’avais un défi à relever. Je connaissais une fille avec qui j’avais grandi. Elle avait lu un article de Life Magazine qui parlait des troupes aéroportées. Je lui ai annoncé que je pensais justement à m’engager dans cette spécialité, mais elle ne m’en crut pas capable. Je lui ai alors lancé un défi pour lui prouver le contraire ! Malheureusement pour moi, je n’ai jamais su lui apporter la preuve, car elle décéda avant que j’obtienne mon brevet de parachutiste. » Suite à sa demande de rejoindre les parachutistes, il intégra rapidement la F Company, 2nd Battalion, 513th Parachute Infantry Regiment, commandé par le Capitaine William E Jakes. Celle-ci était installée à Fort Benning Georgia.

Le 513th Parachute Infantry Regiment fut créé le 26 décembre 1942 et activé le 11 janvier 1943 à Fort Benning en tant qu’unité administrative au Parachute Replacement Pool de la base. Le 31 mai, le régiment perdit son statut administratif pour devenir une unité opérationnelle. Le vendredi 13 août, il fut virtuellement attaché à la 13th Airborne Division, sans en faire organiquement partie. L’entraînement parachutiste spécifique des trois bataillons débuta progressivement les 16,20 et 24 octobre 1943.


Wayne DeHaven photographié au début de sa carrière militaire.

Notez le patch de la 13th Airborne Division

 

Dès son arrivée à la compagnie F, Wayne commença l’entraînement spécifique réservé aux futurs parachutistes. Il consistait en un endurcissement physique et moral par des courses à pied, de la gymnastique, des parcours d’obstacles et de la lutte à mains nues. Ce régime particulier donna à la jeune recrue de la force physique et mentale propre aux unités aéroportées. Ce processus intense était destiné à éliminer les hommes non-aptes ou non-motivés.

« Cette première phase de préparation fut tellement rude que je me suis demandé plusieurs fois si j’allais tenir le coup.  Arès cette première série d’entraînement, j’ai commencé quatre semaines de stage à l’école de saut. Lors de la première semaine, durant le stage A, ma condition physique fut mis à l’épreuve pour voir si j’étais assez endurant et solide. J’y appris aussi le combat au corps-à-corps, le pliage et l’inspection de mon propre parachute. Le stage B portait sur le positionnement de mon harnais, la sortie de l’avion, la maitrise de ma voilure et l’atterrissage. Mes camarades et moi avons d’abords sautés d’un podium, puis d’une maquette en bois. La troisième semaine, pendant le stage C, j’ai connu des tours de différentes hauteurs. Le summum fut atteint lorsque j’ai sauté de celle de cent mètres de haut. Au cours de la dernière semaine, il ne me restait à passer que mon brevet de parachutiste qui consistait en quatre sauts de jour et un de nuit depuis un C47, avec et sans équipement de combat. Plusieurs fois je me suis souvenu des paroles de l’officier qui nous avait accueillis dans un grand auditoire du camp peu après mon arrivée. Il avait entièrement raison en précisant que tout homme qui disait ne pas avoir peur de sauter était un menteur ! Pourtant, je n’ai jamais refusé de sauter. De toute façon toute hésitation devant la porte de l’avion était éliminatoire. J’ai eu la gorge serrée lors d’un saut d’entraînement nocturne dans des conditions de pluies et de tempêtes très difficiles. Le pilote revint à l’aérodrome, car le risque d’accident était trop important, initiative qui ne fut pas du gout d’un général qui lui ordonna de faire sauter les parachutistes coûte que coûte. Le gars eu assez de caractères pour refuser catégoriquement et nous éviter une catastrophe. Initialement, mon régiment était indépendant, mais il fut attaché à la 13th Airborne Division avant même que je n’ai terminé mon entraînement parachutiste. »

Désormais breveté parachutiste, le 15 novembre 1943, le régiment fut envoyé à Fort Bragg, près de Fayetteville, North Carolina. Il y intégra pleinement la division tout en poursuivant la formation individuelle durant treize semaines.

Le 15 janvier 1944, le 513PIR et la division sont arrivés à Camp Mackall, près de Hoffman, en Caroline du Nord. Six jours plus tard, le lieutenant-colonel James W Coutts, officier très charismatique, diplômé de l'Académie militaire de West Point et déjà avec une carrière très accomplie derrière lui, pris le commandement du régiment. Dès lors, il pouvait compter sur l'expérience du Lt-Col. Allen C Miller, son officier exécutif régimentaire, second commandant. Le 19 février 1944, Miller prit le commandement du 2ème Bataillon du 513e PIR (2 / 513PIR). Il fit forte impression sur ses hommes, à tel point qu’ils le surnommèrent respectueusement : Boots and Helmet, Bottes et Casque. Le Bataillon Executive Officer fut le Major Erwin Edwards. Les deux furent très appréciés par la troupe et ont fait un duo très efficace. Quant au 1 / 513PIR, il fut commandé par le lieutenant-colonel Alton R Taylor, alors que le lieutenant-colonel Edward F Kent prit le commandement du 3 / 513PIR. C'est au Camp Mackall que le soldat DeHaven est devint Private First Class. Le 4 mars 1944, Wayne et son régiment ont participé à une manueuvre majeure d'une semaine près de Nashvill et du Liban, dans le Tennessee, un vaste exercice dans des conditions de combat avec d'autres unités alliées. Le temps était sombre, les hommes devant supporter un froid intense, l’humidité, neige et des fortes pluies.

Le 10 mars, le 513th PIR passa à la 17th Airborne Division qui avait été activée à Camp Mackall le 15 avril 1943. Le Général William M Miley commandait cette dernière. A l’issue de ce grand entrainement, la division arriva dès le 24 mars à Camp Forrest, Tennessee. Les conditions de séjours y furent plus agréables qu’à Camp Mackall, car les lieux étaient bien mieux aménagés.

Selon les tables d’organisation des troupes aéroportées, chaque régiment parachutiste devait comporter des spécialistes, notamment en communications. Un appel aux candidats fut lancé pour recruter ces soldats particuliers. Avec plusieurs camarades, Wayne se porta volontaire pour la Communication School et ses 157 heures de cours. Les instructeurs les formèrent au maniement, l’entretient et à la réparation de toutes les techniques de communication pouvant être utilisées lors des opérations aéroportées : radios, téléphones, drapeaux de signalisation, code morse optique et phonique, cryptage et colombophilie. A l’issue du test d’aptitude final, Wayne obtint le titre de Messenger, avec le grade de Technician Fifth Grade (Tec5)
 

Wayne DeHaven au centre avec deux camarades lors des entraînement au Camp Forrest.


Puis vint l’Europe
Le 11 août 1944, la division quitta Camp Forrest pour rejoindre Camp Myles Standish, près de Taunton, Massachusetts. Wayne et ses compagnons d’armes embarquèrent le 20 août à bord du USS Wakefield qui, le même jour, largua les amarres à destination de Liverpool, Royaume-Uni. La traversée dura 8 jours. Depuis le port Britannique, un train amena la compagnie F au camp de tentes installé à Tidworth Barracks, près de Windmill Hill, Wiltshire, où elle s’établit le 29 août suivant. A son arrivé en Europe, la 17th Airborne fut tenue en réserve pour l’opération Market-Garden qui allait se dérouler trois semaines plus tard. Elle intégra le XVIII Airborne Corps du Major-General Ridgeway, elle-même placé sous l’autorité de la 1st Allied Airborne Army. Du Lieutenant Général Lewis Brereton. Le sort de la bataille fut défavorable pour les Alliés et le haut commandement décida de ne pas engager la division au combat. Les sauts d’entrainement et les exercices divers se succédèrent, de jour comme de nuit, cédant souvent la place à des permissions à Londres.

« En Angleterre, c’était différent des Etats-Unis. Le sois j’allais en ville, j’obtenais facilement un pass dès que je le souhaitais, probablement grâce à ma bonne conduite. Beaucoup de soldats étaient privés de sortie, je profitais donc des nombreux laissez-passer disponibles ! »

Du 1er au 4 octobre 1944, le 513 PIR se déplaça vers Barton Stacey, près d’Andover, Hampshire.
Le Capitaine Jakes, hospitalisé depuis peu, dut céder sa place à la tête de la compagnie F au Capitaine Marshall M Reynolds le 5 octobre 1944. Cet homme de petite taille impressionna par son physique athlétique, son très fort caractère et son moral éleva. Il dégageait l’image du vrai leader, car il participait à tous les entrainements et partageait tout ce que c’est soldats enduraient. Ferme, mais correct, il bénéficia du respect et de la confiance de ses subordonnés. La rencontre avec Reynolds fut décisive pour Wayne :

« Peu après sa prise de commandement, Reynolds me vit avec d’autres soldats en train d’analyser un problème tactique en le dessinant dans la terre. Il se retourna vers moi et me dit – Voici la manière avec laquelle j’aime vous voir agir ! – J’ai alors senti qu’il nous appréciait et nous l’estimions aussi. Nous le surnommions Bud ou encore Canon Ball. Je ne sais pas pourquoi il me choisit comme son opérateur radio personnel, raison pour laquelle j’ai intégré la section d’état-major de la compagnie. Pour m’aider dans ma tâche, j’ai pu choisir mon très bon camarade, le Tec5 Neal Haggard, que je connaissais depuis Fort Benning. Lui aussi avait suivi le cours de spécialisation en communications. Mon principal outil de travail fut le combiné émetteur-récepteur SCR300, une radio portée sur le dos. Lors des entraînements de ma compagnie, je n’étais jamais loin du Capitaine, car je devais être là s’il avait besoin de moi. Ma situation particulière me permit d’être en contact avec les officiers de la compagnie. Reynolds était accompagné de son second le Lieutenant Dean. Le 1st Platoon était commandé par le Lt Robert J Gilles. Le 2nd Platoon par le Lt Samuel Calhoun et le 3rd Platoon par le Lt Charles D Puckett. Notre 1st Sergeant se nommait Royal W Donovan. »

Prélude à l’enfer
Le 16 décembre 1944, les Allemands lancèrent une offensive d’envergure dans les Ardennes Belges et au Grand-Duché de Luxembourg. Deux jours plus tard, la 17th Airborne Division fut mise en état d’alerte et dut se tenir prête à faire mouvement. Les permissions furent annulées, tous les hommes préparèrent le matériel personnel et collectif ; par soucis de discrétion, ils durent découdre leur insignes et grades. Le transfert du 513PIR vers le continent débuta le 19 décembre depuis Barton Stacey et s’effectua en trois échelons à cause de la mauvaise météo et de la mobilisation de tous les avions disponibles pour approvisionner la ville de Bastogne encerclée. Wayne fit partie du troisième échelon incluant le 2 et 3/513PIR. Il quitta l’aérodrome de Chibolton à bord d’un C-47 le 24 décembre à 10 heures 05 pour atterrir à 13 heures 30 sur l’aérodrome A70 à Couvron-et-Aumencourt, Aisne, France, situé dix kilomètres au nord de Laon, Aisne. Il fut ensuite transféré en camions vers Camp Mourmelon-le-Grand, Marne. Arrivés séparément, les trois échelons se rassemblèrent en fin d’après-midi au camp français recouvert d’une fine couche de neige. La division fut placée sous l’autorité du VIIIth Army Corps du Lieutenant General Troy H Middelton, subordonné à la 3rd Army commandé par le Général George S Patton. La compagnie F se composait alors de huit officiers et de cent cinquante hommes de troupe ; tous avaient un moral élevé.

« Le lendemain vers 19 heures, après avoir passé la nuit et m’être contenté d’une ration C comme repas de Noël, je suis remonté dans un camion pour une destination tenue secrète. Nous nous serions les uns contre les autres pour nous tenir chaud. Ma compagnie arriva à Stenay, Meuse le 26 décembre. Elle se positionna sur la route d’accès à la ville, à deux kilomètres et demi au nord-ouest, pour effectuer notre première mission de combat : poser des mines, établir des barrages routiers et des avant=postes pour endiguer une éventuelle expansion allemande au-delà de la rivière Meuse. Mes camarades proches et moi-même étions installés dans une sorte de moulin à papier situés près des ponts dont nous avions la garde. Souvent, nous devions réparés les lignes téléphoniques dont les fils étaient volontairement sectionnés. J’ignorais s’il s’agissait de sympathisants des Allemands ou de personnes forcées d’agir pour eux. »

La compagnie F ne fut pas la seule à s’installer à proximité de la Meuse à partir du 26 décembre : la compagnie d’état-major régimentaire occupa Chatel-Chéhéry, le 1/513PIR s’installa à Omicourt, le 2/513PIR s’établit à Stenay et le 3/513 investit Verdun. Sur place la division releva la 11th Armored Division arrivée en France peu de temps auparavant. Les rigueurs de l’hiver se firent sentirent par une neige plus épaisse, de la brume, de l’humidité et des températures négatives. Le jour de la Saint-Sylestre à 10 heures 30, le Tec5 Wayne DeHaven et sa compagnie quittèrent Stenay en camion pour rejoindre Aincreville, Meuse, où les cuisiniers de la compagnie F préparèrent des dindes pour célébrer le Nouvel An.
Le jour de l’An 1945, le régiment quitta la France pour rejoindre la ligne de front à l’ouest de Bastogne, en Belgique. Il passa à proximité de Montmédy en milieu d’après-midi avant de traverser la frontière du côté de Florenville. Vers 22heures, l’unité s’arrêta à 1,6 kilomètre au nord-ouest de Bercheux pour y bivouaquer pendant la nuit.
Le lendemain, les hommes remontèrent en camions à Bercheux pour arriver finalement à 8 heures 30 au carrefour formé par la route principale reliant Neufchâteau à Bastogne et la route secondaire menant à Morhet, au sud-ouest de Bastogne. Pour le régiment, cette localité fut la zone de rassemblement préalable à sa montée en ligne. Le Tec5 DeHaven et ses camarades se doutèrent qu’ils se rapprochaient du front car l’artillerie résonnait eu loin.

Dès lors à pied, ils traversèrent Morhet où le Général Miley venait d’établir son poste de commandement divisionnaire. Les tirs sporadiques de l’artillerie causèrent les huit premières victimes de la compagnie F : un mort et sept blessés. Les parachutistes obliquèrent vers Jodenville à l’est, suivant une route étroite et sinueuse transformée en bourbier par la neige et les véhicules de la 11th Armored qui l’avaient emprunté auparavant. L’état du terrain ne facilita pas la marche des hommes ni le roulement des chariots transportant les munitions et les armes collectives. Le 513PIR passa ensuite par le hameau de Flohamont où le Lt.-Col. Coutts installa sonpremier poste de commandement. A l’approche du village de Lavaselle, se trouvaient partout des véhicules détruits, des équipements abandonnés ainsi que des cadavres allemands et américains raidis par le gel et recouvert de neige. Les soldats commencèrent à se rendre compte que l’enfer dans lequel ils venaient d’arriver. Chenogne fut le dernier village traversé par le régiment avant l’entrer dans le Bois de Fragotte où, peu avant minuit, les 1 et 2/PIR prirent position, alors que le 3/513PIR resté en réserve régimentaire à Jodenville.
Le 3 janvier à 8 heures du matin, le 2/513PIR releva des éléments de la 11th Armored au village de Mande-Saint-Etienne et au hameau de Monty. Quelques heures plus tard, venant du nord, neuf chars ennemis accompagnés d’infanterie du 29. Panzergrenadier Regiment (Pzgrd Regt.) et couverts par des mortiers et de l’artillerie tentèrent de profiter du changement de situation. Ils furent néanmoins repoussés après que quatre d’entre eux succombèrent face aux bazookas américains. Les Allemands se retranchèrent au nord-ouest, dans les bois surplombant la localité. Rapidement, le bataillon se retrouva dans une situation délicate, mais il avait organisé de solides défenses en créant notamment des barrages routiers sur les routes menant à Champs et Bastogne. A 18 heures, lorsque le Général Miley donna ses ordres pour le lendemain, le 513PIR constituait le flanc droit de la 17th Airborne Division, jouxtant le 327th Glider Infantry Regiment, 101st Airborne Division. Un premier problème tactique de taille se produisit en fin de journée sur le flanc gauche du régiment. On constata un espace inoccupé de huit cents mètres séparant le 1/513PIR et le 550th Infantry Airborne Battalion, servant de troisième bataillon au 194th Glider Infantry Regiment. Des patrouilles de liaison envoyées par les deux unités comblèrent et sécurisèrent la zone.
Pour Wayne, la bataille des Ardennes venait de débuter ! La météo hivernale était exécrable, un épais tapis de neige recouvrait le sol gelé, le ciel était bas et complètement bouché, la température avoisinait en moyenne les -3°C. Les premières engelures apparurent rapidement, les victimes de pieds gelés arrivèrent dans les postes de secours avant même d’avoir combattu. A tout moment, pour maintenir la circulation sanguine dans les membres inférieurs, les soldats devaient battre des pieds sur place. Le manque d’équipement chaud se faisait cruellement ressentir. Creuser un foxehole pour se protéger devenait un véritable calvaire pour les soldats qui pelletaient un sol gelé, la difficulté étant doublé par l’obscurité totale qui régnait sous les sapins.

 « Souvent nous avons occupés des foxholes allemands qui étaient larges et bien aménagés, parfois recouvert de rondins, de branches et de végétation. Les Allemands ne lésinaient pas quand ils construisaient leurs trous, contrairement à nous, ils avaient le temps de bien les faires. »

Combattre au plus fort de l’hiver
La 17th Airborne Division attaqua le jeudi 4 janvier 1945 à 8 heures 15 dans un froid glacial. Dès le lever du jour, le 1/513PIR du Lt. Col. Taylor essuya des tirs d’artillerie, de mortiers et de mitrailleuses alors qu’il progressait péniblement à travers champs et bois. Des Panzers venant du nord-ouest empirèrent encore la situation. Le bataillon chercha d’abord à atteindre le hameau de Cochelonval logé le long de la route national Marche-en-Famenne à Bastogne. Ensuite, il devait prendre Flamisoul, son objectif final. Le bombardement ennemi coupa toute communication avec l’arrière, empêchant ainsi toute demande de tir de contre-batterie. La situation se dégrada très vite jusqu’au blocage total.
Pour le 2/513 du Lt Col Miller, les bois au nord-ouest de Mande constituaient le premier but à prendre. Sa compagnie F se tenait prête dans la partie ouest du village et sa compagnie D dans la partie est. Trois canons tractés de 57mm du 155th Airborne Anti Aircraft Battalion vinrent soutenir le bataillon. Malgré des zones minées, l’avance des deux compagnies ne rencontrera pas d’opposition marqués. L’optimisme disparut rapidement face à la résistance grandissante du III/115. Pzgrd Regt., 15. Pzgrd Div., retranché dans le bois sur le flanc gauche et devant la compagnie F. Les Allemands ouvrirent le feu nourri au point que les parachutistes eurent du mal à identifier l’origine des tirs, tant ils venaient de tous les côtés et tant la visibilité était réduite. La progression s’enlisa. Seul le peloton du 2nd Lt Charles Puckett gagna l’orée du bois, mais fut cloué sur place par des tirs venant de derrière. Wayne et ses compagnons se retrouvèrent exposés en plein champ, incapables de réagir. Le peloton du Lt Richard Manning de la compagnie E, fut envoyé pour venir en renfort à la compagnie F. Le peloton du Lt Samuel Calhoun profita de ce soutien pour se ressaisir et chargea l’ennemi à la baïonnette. En 45 minutes environ, ils nettoyèrent les bois et capturèrent 23 prisonniers. Cette intervention permit à l’unité de DeHaven de se réorganiser avec les hommes qui lui restaient encore ! Traversant le bois fraîchement conquis, elle atteignit son premier objectif à 11 heures 30. Allant toujours de l’avant, des hommes de la compagnie F traversèrent un autre bois et éliminèrent deux chars ennemis à l’aide de grenade Gammon. Ils atteignirent finalement Flamisoul, l’objectif final. Sur le flanc droit, face au II/115 Pzgrd Regt., 15. Pzgrd Div., la compagnie D accrut elle aussi sa pression vers le nord, forçant l’ennemi à quitter le bois situés un kilomètre à l’est de Flamisoul. Pendant ce temps, à l’arrière de la ligne de front, des chars Allemands se rapprochèrent de Mande par l’est, mais rebroussèrent finalement chemin face aux trois canons de 57mm auxquels ils ne s’attendaient pas.
A 14h30, le Lt Col. Coutts, qui avait avancé son poste de commandement dans le Bois des Valets, décida d’arrêter l’attaque de son régiment pour éviter d’autres pertes inutiles. Vu les difficultés rencontrées par le 1/513PIR au sud de la route nationale et son taux élevé de perte, il fut remplacé par le 3/513PIR. Le Bataillon de Taylor revint dans le Bois de Fragotte qu’il avait quitté le matin même et s’étendit également dans le Bois des Valets. De son côté, Miller reçut l’ordre d’arrêter sa progression et de conserver le terrain conquis en y creusant des positions défensives, ce qui exclut d’engager au combat le reste de la compagnie E tenue en réserve dans la partie sud-est du village. La situation du bataillon ne fut pas reluisante, car il était déjà en sous-effectifs, ses hommes étaient dispersés, les munitions manquaient et l’artillerie ennemie pilonnait régulièrement l’endroit. Un sniper Allemand installé dans le clocher de Mande menaçait les soldats portant une radio ou de l’équipement, ainsi que le poste de commandement du bataillon logé dans une ferme située au nord-ouest de l’église et du cimetière. L’artillerie mit fin à cette menace malgré la forte tempête de neige qui réduisait la visibilité. Beaucoup d’hommes nécessitèrent d’être évacués vers les lignes arrière, mais ils ne purent l’être avant l’obscurité nocturne. Au poste de secours installé dans la partie sud du village, les infirmiers arrivèrent rapidement à court de matériel et de plasma, car le nombre de blessés ne faisait que croître.
En fin d’après-midi, alors que les chutes de neige prirent fin, la situation de la compagnie du Tec5 DeHaven devint très difficilement tenable face à l’attaque Allemande lancée depuis Flamierge au nord-ouest. Les deux pelotons enterrés entre Flamisoul et Mande encaissèrent durement le choc et reculèrent vers le sud-ouest du village. Ils passèrent à travers la compagnie D qui retraitait à son tour. La compagnie E constitua ainsi la dernière ligne de défense du village. Jusqu’à 23 heures, ce repli se déroula de manière progressive et par petits groupes pour tenter de ralentir l’attaque. Toutefois, les hommes qui avaient atteint Flamisoul ne donnaient plus signe de vie, on les considéra ainsi comme prisonniers de l’ennemi. A Mande, le bilande la Compagnie F fut très lourd : sur 162 hommes engagés le matin, 61 furent mis hors de combat, soit 37.50% ! Les pertes se répartirent entre 16 tués, 35 blessés et 10 évacuations médicales pour pieds gelés. Il restait encore 6 officiers et 95 hommes de troupes.
En quelques heures les deux bataillons de Taylor et Miller subirent de lourdes pertes, le choc fut terrible et déforça irrémédiablement leur organisation. Au total, le 513PIR comptabilisa 530 hommes hors de combat ! Ce premier engagement face à l’ennemi entraina également un remaniement de la ligne de front : sous le couvert de l’obscurité, le 193GIR s’installa à l’est de Mande-Saint-Etienne pour supporter le régiment malmené et en grande précarité.
En cours de nuit, dans un froid glacial, de l’approvisionnement parvint jusqu’au village soumis à plusieurs tentatives d’infiltrations ennemis ; celle-ci furent repoussées au fusil, à la grenade et au couteau. Le projet d’attaque pour le lendemain à 8h15 prévoyait de renforcer la compagnie D par la compagnie E afin de mettre la pression sur l’ennemi établi dans le bois devant la compagnie F. Il fallait tenir et consolider la position avant d’avancer vers Flamisoul, malgré les denses chutes de neige et la brume qui réduisirent la visibilité à cent mètres environ.
Dsè le matin du 5 janvier, le bataillon de Wayne DeHaven essuya plusieurs tentatives de percées par des Panzergrenadiers et des chars venant de Flamierge, appuyés par des Nebelwerfers et l’artillerie. Ils approchèrent des lignes américaines, mais furent repoussés par des bazookas et des mortiers de 81mm. Endurant le blizzard, le 513PIR se réorganisa et effectua des patrouilles pour tâter les forces ennemies. Le ciel nuageux et bas empêchait toujours l’aviation d’intervenir. De nuit, l’aviation Américaine bombarda les hauteurs nord de Flamierge pour maintenir l’ennemi à distance. Il s’agit probablement du moment où Wayne accompagna un observateur d’artillerie pour épier les Allemands.

« On m’ordonna de quitter le village pour partir en mission sur le sommer de la colline avec un camarade et un observateur d’artillerie. Nous avons trouvé un bon foxhole à côté d’un arbre dans lequel monta l’obervateur d’artillerie. Alors qu’il scrutait les environs et qu’il me précisait les coordonnées, nous avons été bombardés. L’observateur sauta de l’arbre dans le trou où se trouvait mon camarade en état de choc. Nous l’avons ramené vers l’arrière en le portant. » La compagnie F ne perdit ce jour-là que 10 hommes, tués, blessés, disparus ou évacués pour engelures.
Le 6 janvier, le dispositif américain apparaissait comme suit : le 1/513PIR était retranché dans la partie nord du Bois des Valets, le 2/513PIR occupait l’est du Bois des Valets et l’ouest du Bois de Fragotte suite à son récent retrait de Mande et Monty, alors que le 3/513PIR tenait une zone comprise entre Monty et le Bois de Fragotte. 11 chars de la 11th Armored arrivèrent en soutien des parachutistes, mais ne résistèrent pas longtemps face à la forte réaction allemande qui leur infligea quatre pertes. Pour la compagnie de Wayne, le bilan humain de la journée s’éleva à huit pertes. Le second ordre d’attaque majeur arriva au Lt Col Coutts en soirée. Le lendemain, son régiment devait partir à l’assaut vers le nord-ouest pour s’emparer du village de Flamierge et des hauteurs au sud de la route nationale. A quelques heures de cette nouvelle offensive, Wayne se préparait à l’action avec ce dont il disposait.

« Je ne disposais pas de grand-chose, car mon kit-bag avait disparu depuis le départ de Chibolton. Sous un long manteau de laine, j’étais vêtu de mon uniforme, je portais plusieurs paires de chaussettes et des gants de laine. Comme équipement, je ne portais que la radio SCR300 et un pistolet automatique de calibre .45. Je n’avais que mes bottes de saut, mais je n’ai jamais eu les pieds trop mouillés. Je pense que les gars du Minnesota et du nord des Etats-Unis étaient plus résistant au froid, contrairement aux hommes du sud qui se plaignaient beaucoup. Les rations C étaient mangeables étaient mangeable mais pas exceptionnelles, de même que les rations K dont j’appréciais particulièrement les spaghettis et le chili. Je fumais les cigarettes fournies avec les rations K, mais je n’ai jamais compris pourquoi ils ne procuraient pas d’allumettes ! »

Un jour gravé dans sa chair
Le dimanche 7 janvier à 9 heures du matin, après une préparation d’artillerie, le 513PIR quitta ses positions et s’élança depuis le Bois de Fragotte et le bois des Valets vers ses nouveaux objectifs : Flamierge et la colline 510. Ce jour-là, les conditions météorologiques défièrent l’imagination : une nouvelle couche de neige atteignant les genoux par endroits était tombée en cours de nuit, les nuages bas bouchaient le ciel, le brouillard perpétuel limitait fortement la visibilité et la température avoisinait les -6°C !
Le 2/513PIR resta en réserve dans le bois, prêt à intervenir alors que le 1/513PIR progressa au sud de la route nationale, se dirigeant vers la colline 510. Le 3/513PIR machant au nord de la route, mit le cap sur Flamièrge. Pour cette dernière unité, le Major Morris Anderson avait repris le commandement du Lt Col. Kent blessé peu avant. Dans le but de faciliter la progression et de rendre les mouvements plus rapides, les hommes reçurent l’ordre de s’alléger au maximum ; ils attaquèrent ainsi avec l’équipement strictement nécessaire. Aucun espoir aérien ne fut possible à cause des nuages bas et denses. Une fois les hommes repérés, ils devenaient la cible des mortiers, des mitrailleuses et de l’artillerie allemande. Malgré cela, Anderson parvint à investir Flamièrge à 11h55. 5 minutes plus tard, l’ennemi contre-attaqua avec des chars embusqués au nord du village et depuis Flamisoul. Les deux bataillons firent alors face à la Remer Brigade, élément de la SS Führer Begleite Brigade, ainsi qu’au III/29 Pzgrp Regt. A Flamièrge, la trop forte pression obligea les Américains à reculer. Toutefois, le Lt Col. Coutts ne perdit pas confiance et confirma ay 1/513PIR l’ordre de prendre les hauteurs.
En chemin, ce bataillon détruisit trois blindés allemands, ce qui n’empêcha pas son avance de s’essouffler, notamment à cause des pertes subies le 4 janvier.
Coutts envoya le 2/513PIR pour soutenir l’effort, mais ce dernier subit rapidement les assauts du II/15 Pzgrd. Regt. Sur son flanc droit et d’un kampfgruppe de la 9 Panzer Division, de front. La compagnie d’état-major et les compagnies D et F restèrent du côté sud de la route, seule la compagnie E traversa du côté nord. Chacune se déploya tout en avançant. A l’approche du sommet de la colline, les tirs des canons et des Nebelwerfers s’intensifièrent graduellement, retournant les champs qui commençaient à ce joncher de corps et de pièces d’équipement. Le sang teintait la neige à plusieurs endroits et les infirmiers s’activaient pour sauver les blessés. Bien souvent, les hommes ne trouvaient qu’un petit fossé ou le lit d’un ruisseau pour se protéger des éclats, car le terrain ne leur offrait pas d’autre abri. Toutefois, il était encore préférable de continuer à avancer plutôt que de rester tétanisé et à la merci du sort. Comme plusieurs de ses camarades, le Tec5 DeHaven se retrouva sous ce bombardement :

« Nous marchions près de la route lorsque des balles frappèrent le sol près de mon pied. Localisé, le tireur allemand perché sur un poteau télé phonique fut abattu par mon squad. Lorsque des obus de gros calibre commencèrent à tomber, mon copain Neal Haggard supposa que nous avions été repérés par un observateur d’artillerie ennemi. A ce moment-là, je transmettais vers l’arrière un message du Capitaine Reynolds annonçant que nous étions cloués sur place près d’une ferme. Neal se trouvait à mes côtés, ils étaient aux aguets pour protéger notre groupe d’état-major qui suivait le peloton du 2nd Lt Puckett. Un obus de mortier ou de 88mm explosa alors à proximité de nous et je sentis immédiatement que quelque chose n’allait pas. Je l’entendis arriver puis l’explosion résonna dans mes oreilles telle l’horloge de Big Ben. Je fis glisser la radio de mes épaules lorsqu’Edward Dahlberg et Willis Grice accoururent pour me porter secours. Ils constatèrent que des shrapnels avaient percés mon casque à plusieurs endroits : un gros trou à l’arrière et plusieurs petits partout ailleurs. Dieu soit loué, j’étais vivant ! Neal reprit la radio pour continuer la mission, mais il ne s’aperçut qu’après quelques secondes qu’elle était criblée d’impacts et que le panneau de commande supérieur était détruit. Ma radio était hors d’usage, presque coupée en deux, mais elle m’avait probablement sauvé la vie en absorbant la majorité des éclats. Peu de temps après, on m’évacua en ambulance vers un poste des premiers secours. »

Ce ne fut qu’après ce barrage d’artillerie et la blessure de Wayne que le peloton de tête de la compagnie F arriva à la hauteur du carrefour formé par la route nationale et la route menant à Flamièrge vers le nord. A gauche se trouvait un chemin creux conduisant à un petit bois rectangulaire qui constituait l’objectif de l’unité. Le sommet et les champs qui y menèrent entrèrent plus tard dans l’histoire de la 17th Airborne Division sous le nom de Dead Man’s Ridge, la Crête de l’Homme Mort. En effet, depuis quatre jours, des tentatives infructueuses coûtèrent de nombreuses pertes aux 194GIR et 513PIR.
Malgré la présence d’Allemands retranchés sur la colline 510, les hommes de Taylor conquirent le sommet, talonnés par ceux du 2/513 PIR. De son côté, le 3/513PIR peinait toujours pour reprendre le village face à des canons automoteurs et des chars. ; il dut attendre 17h15 pour s’en emparer. Cependant, la prise des deux objectifs créa un saillant dans la ligne de front, la situation risquait d’être fatale aux parachutistes pris en étau et presque isolés du reste de la division. Les hommes d’Anderson s’apprêtèrent à résister et à tenir un siège en établissant un système défensif. L’ennemi comprit bien cette délicate situation et tenta toute la nuit de déloger les Américains en les harcelant sur leurs trois flancs avec des chars et de l’infanterie. Pour tous, les chutes de neige et le froid s’intensifièrent, alors que les effets chauds se trouvaient toujours dans les positions de départ quittées le matin. Lors de cette seconde importante journée de combat, la compagnie F recensa la perte de 12 soldats, dont celle du Tec5 Wayne DeHaven, blessé.

Blessé, mais l’histoire de s’arrêta pas
Alors que Wayne fut évacué de la ligne de front et emmené dans un hôpital de campagne pour soigner ses blessures, ses camarades de la compagnie F continuèrent à se battre dans des conditions hivernales très rudes et face à un ennemi toujours aussi déterminé à résister. Le 8 janvier 1945, son régiment fut obligé de battre en retraite et d’abandonner ses gains territoriaux de la veille pour éviter d’être submergé par les Allemands. Dans les jours et les semaines qui suivirent, le 513PIR put finalement progresser vers le nord-est à la poursuite des troupes Allemandes qui avaient opéré un repli général jusqu’à la frontière allemande. En février, le régiment se battit encore au Grand-Duché de Luxembourg, le long de la rivière Our, pour tenter de créer une tête de pont en Allemagne, avant qu’il soit retiré du front pour se reposer, se renforcer et s’entrainer en vue de l’opération Varsity. Cette opération aéroporté de grande ampleur eut lieu le 24 mars 1945 sur la rive est du Rhin entre Hamminkeln et Wesel, en Westphalie, Allemagne. L’unité de Coutts connut des pertes, mais réussit sa mission. Pendant un mois, le régiment avança rapidement jusqu’à Münster tout en balayant les troupes allemandes sur le point de s’effondrer. Après deux mois passés en tant que force d’occupation à Oberhausen, dans le Ruhr, les soldats du régiment furent transférés à Tatonville, Meurthe-et-Moselle, France, en vue du retour aux Etats-Unis ou du redéploiement sur le front du Pacifique.

D’un hôpital à l’autre vers le retour à la vie civile
Les éclats métalliques qui frappèrent le Tec5 Wayne DeHaven ne causèrent que des entailles cutanées, aucun nerfs ni aucune artère ne fut sectionné, ce qui le classa dans la catégorie blessé légers. Ses plaies à la tête furent traités avec de la pénicilline pour éviter qu’elles ne s’infectent. Un chirurgien retira les éclats fichés entre ses épaules et dans le bas de son dos. Les interventions chirurgicales et sa longue convalescence dans plusieurs hôpitaux militaires exclurent son retour au sein de la compagnie F.

« Après avoir été évacué du champ de bataille le 7 janvier 1945, je suis arrivé dans un hôpital de campagne non loin du front, peut-être à Bastogne, mais je n’en suis pas certain. C’est là que les chirurgiens m’ont opéré pour extraire les fragments d’obus. Le lendemain j’étais déjà capable de me lever et de marcher. J’y suis resté pendant quelques jours et y ai revu certains de mes compagnons d’armes, blessés eux aussi. J’ai ensuite été transféré vers un premier hôpital de convalescence, puis un second à Paris, ce qui me donna l’occasion de voir la tour Eiffel. J’ai écrit une lettre à ma mère pour li dire que j’étais blessé, mais en bonne santé ; elle arriva à destination bien avant l’avis officiel envoyé par l’armée ! On m’envoya par bateau en Angleterre où peu de temps s’écoula avant que je puisse monter à bord d’un navire en partance pour New York. Le 12 avril 1945, au cours de la traversée de l’océan atlantique, j’appris le décès du Président Roosevelt. Après un changement de route, je suis finalement arrivé à Boston, j’étais déçu, car je n’avais pas vu la Statue de la Liberté ! A mon arrivée, l’une des premières choses que je fis fut d’appeler ma mère pour lui dire que j’étais de retour au pays. Le traitement de mes blessures continua au 91st Schick General Hospital établi à Clinton, Iowa. Même si j’y ai séjourné un bon moment, je bénéficiais toutefois de permissions médicales que je mettais à profit pour retourner temporairement chez mes parents. L’hôpital de Battle Creek, Michigan, fut le dernier établissement de convalescence que j’ai fréquenté avant d’y être démobilisé le 7 octobre 1945 pour incapacité physique. A mes yeux, tous ces jours passés dans les hôpitaux furent de la dilettante, car il n’y avait pas grand-chose à faire pour s’occuper. On me demanda ce que je voulais faire après mon départ de l’armée. Pour éviter d’être réengagé, je répondis que je voulais devenir fermier et conduire des engins agricoles. Selon moi, l’armée n’aurait pas beaucoup besoin de fermiers pour fonctionner, d’où la raison de ma réponse. »

Sa guérison complète fut officialisée quelques jours avant sa démobilisation, après avoir passé 273 jours dans les hôpitaux militaires, dont 90 dans des établissements situés outre-mer. Malgré les interventions chirurgicales, il garda à vie quelques éclats entre les épaules et dans le bas du dos !

Le 12 juin 1945, lors d’un congé médical, Wayne DeHaven demanda en mariage sa petite-amie Dolores Otto, fille d’immigrés allemands. Il l’avais rencontré dans une salle de bal à Saint Paul pendant une permission alors qu’il était à l’entrainement aux Etats Unis. La cousine de Dolores, également présente au bal, avait fréquenté la même école que Wayne. La jeune femme demanda à sa cousine de les présenter l’un à l’autre ; ce fut ainsi qu’ils firent connaissance. A cette époque, Dolores travaillait dans une usine sous-traitante de la Minnesota Mining and Manufacturing qui œuvrait notamment pour l’effort de guerre. Après sa démobilisation, Wayne retourna en train à Saint Paul pour renouer avec la vie civile et y retrouver sa fiancée. Mariées le 29 septembre 1946 en l’église catholique de Saint Bernard à Saint Paul, ils s’installèrent à Roseville dans une maison située en face de celle des parents Otto. Le couple fit construire sa propre maison en 1951 sur un terrain offert par les parents de Dolores, toujours à Roseville. Trois enfants naquirent de leur union : Shanon vint au monde le 29 août 1947, Gloria le 9 décembre 1949 et Wayne Junior le 9 juin 1951. Les époux ont également 5 petis-enfants et 6 arrière-petits-enfants. A ce jour, Wayne et Dolores vivent toujours dans la même maison depuis 65 ans. Après la guerre, le vétéran parachutistes travailla un petit temps à la Martin’s Bakery avant d’offrir successivement ses services à Cottage Donuts, à Central Warehouse et au district scolaire de Roseville pour lequel il exerça la fonction de gardien. Ce fut son dernier emploi avant sa retraite en 1985.
Lors des multiples réunions auxquelles il participa avec ses camarades vétérans de la 17th Airborne Division Association au cours des décennies passées, il mentionna souvent son désir de retourner en Europe et revoir les endroits par lesquels il passa en 1944 et 1945. Il ne pensait jamais avoir l’occasion de réaliser son souhait, jusau’au jour où la possibilité lui fut offerte de manière totalement inattendue. Accompagné de son fils, Wayne Jr, ce voyage d’une vie eut lieu à la fin mars 2016, à l’approche des 93 ans. Wayne est également membre des associations patriotiques suivantes : Veterans of Foreign Wars, American Legion, Disabled American Veterans et le Military order of the Purple Heart.
Le Technician Fifth Grade Wayne H DeHaven est crédité de la campagne « Ardennes-Alsace ». Il est également titulaire des décorations suivantes : Parachutist Badge, Combat Infantryman’s Badge, Purple Heart Medal, Good Conduct Medal, America, Theater Medal, European-African-Middle Eastern Theater Medal with one Bronze Star.